dimanche 10 février 2013

I. 1) Le culte de la personnalité dans l'Antiquité

Bien que le terme de « culte de la personnalité s’applique communément aux régimes contemporains, ses racines remontent à l’Antiquité. En effet, dès l’époque des pharaons apparaît une volonté marquée des tenants du pouvoir politique de valoriser et surtout de préserver leur domination par des procédés d’individualisation (c’est-à-dire se démarquer d’une classe politique ou d’une dynastie par la mise en avant d’une personnalité propre, le plus souvent à l’aide d’exagérations et inventions diverses).
Ramsès II, mégalomane, inonde l'Egypte de statues géantes 

On peut résumer les traits communs aux différents cultes de la personnalité observés dans l’Antiquité : tout d’abord, de manière quasiment invariable, une filiation directe ou indirecte avec les dieux et/ou les personnalités fondatrices correspondant aux civilisations concernées. Ensuite, une volonté marquée de laisser une empreinte dans l’Histoire (toujours dans l’idée de se démarquer des prédécesseurs et des éventuels successeurs). Enfin, et ce point découle du précédent, une usurpation des acquis des précédents dirigeants dans des domaines divers (aussi bien politiques qu’artistiques).
Le terme « pharaon » désigne les rois issus des nombreuses dynasties ayant régné sur l’Egypte ancienne de -3150 (dynastie zéro) à -30 (dynastie des Ptolémées)  avant notre ère. Les pharaons basaient leur légitimité avant tout sur l’héritage de leur dynastie, mais également sur leur nature divine (le pharaon est invariablement fils de Rê, sa filiation avec les autres dieux varie selon sa convenance).


Statue grandeur nature du pharaon
Autre statue géante de Ramsès II 

Ramsès II régna de -1279 à -1213. Il manifesta tout au long de son règne une volonté inébranlable de marquer l’Histoire comme un souverain hors du commun. Il fit bâtir un nombre important de temples et autres monuments. Par ailleurs Ramsès II fit exécuter une quantité considérable de statues à son effigie, qu’il fit envoyer dans tout le royaume. Il fit apposer son nom à tous les monuments antérieurs à son règne. Il exige d’être appelé Ramsès le Grand, et met en avant sa prétendue filiation divine, se prétendant sauvé par Amon lui-même durant une bataille. Il laisse une telle quantité d’œuvres et monuments à sa gloire qu’il demeure le pharaon le mieux connu. En outre, les grands musées renferment des quantités de statues à son effigie.


Si Ramsès II a amplifié un culte existant avant son arrivée au pouvoir, d’autres souverains antiques ont institué un culte propre à leur règne : parmi eux, Octave Auguste, premier empereur de Rome.
 
L'une des innombrables Statue d'Octave Auguste

Octave, fils adoptif de César, arrive au pouvoir en -27 avant J-C. Ce faisant, il officialise l’empire, Etat effectif depuis la prise du pouvoir par son père adoptif proclamé « dictateur à vie » en -44 (le terme de « dictateur » désignant à l’époque une fonction accordée le plus souvent à titre temporaire à un consul ou un général en période de crise grave).
 
Octave, dès les premiers temps de sa carrière politique, profite de sa proximité avec le défunt général : il porte alors le nom de Caius Iulius Caesarius Octavianus  (César le Jeune). Soutenu par le Sénat, il rétablit l’ordre dans la République chancelante et reçoit en -27 le titre de « Augustus » (sacré), « cognomen » (surnom) jusqu’alors réservé aux dieux. Octave-Auguste base son culte de la personnalité non exclusivement sur sa personne (présentée dans tous l’Empire comme une âme d’une clairvoyance rare doublée d’un génie militaire réformateur) mais aussi sur celle de César : il fait ainsi entrer ce dernier dans le cercle des dieux romains (le passage d’une comète, puis la formation d’une constellation serviront de preuves pour cette béatification, par ailleurs approuvée par nombre de romains). Fils du nouveau dieu, Octave-Auguste jouit du prestige et de l’approbation divine. Enfin, pour la première fois depuis la fondation de la République, l’empire est inondé de statues à la gloire du nouveau maître. Il convient de préciser que les héritiers d’Octave utiliseront des procédés similaires à leur propre gloire.

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